Le Pepo Tour Base Nato 2023, le troisième jour

Le troisième jour, pas de répit pour les braves !! le Pepo Tour continue, avec ceux qui peuvent s'offrir cette journée de plus… en voici le récit !

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La soirée véritablement satisfaisante me laisse une grande joie, je suis apaisé et le jour se lève sur la Toscane. J’ai demander à Paolo notre hôte, de juste prévoir du café et un jus d’orange pour un départ léger. Une partie de l’équipe va se séparer aujourd’hui car nous avons des gens qui vont se lever tôt me lendemain pour aller bosser. Les deux premiers objectifs sont passés et il reste la grande boucle. J’avais déjà ouvert cette trace sur un retour du run des trois îles en corse Sardaigne et Sicile. Je la connais sur le bout des doigts . C’est un long roulage de 350 kms de routes de montagnes et de pistes étroites, de chemins, de petites ruelles colorées entre ligure et toscane. Il va falloir environ 12 heures de route non stop pour cravacher le gps et lui faire tomber la moyenne afin d’aménager des temps de repos. Tout le monde ce matin est pourtant reposé, je suis étonné. Les tentes sont rapidement pliées et les packetages sanglés. On sent que l’équipe est prête à en découdre.

Première phase, sortir de la montagne et de ce chemin qui n’en fini pas, encore une fois les trails sont devant et moi et les trois autres routières en arrière. Le groupe se met en route et très vite un nuage de poussière se lève sur la piste dont les racines épaisses, pierres et graviers font l’animation. Là déclivité est importante et ça commence à grimper sévère, la 900 diversion passe comme un lada niva, dans la douleur mais ça passe. Quelques point de localisation plus tard nous retrouvons le bitume étroit d’une route forestière, mais ça ne va pas durer, le principe c’est d’alterner les types de parcours.
On dégage vite sur une grande série de cols à plus de 2000 avec de grandes enfilades interminables. La cadence augmente sensiblement et le chrono avec, on est quasiment sur une conduite de type rallye routier. Ça file à 50 de moyenne, le bitume est assez rude mais j’ai des Pirelli str et je peux vous dire que ça colle au pavé comme jamais. Y’a des feuilles, des flaques, des parties lisses et du gravier, on passe facilement un virage par seconde sur certaines sections, pendant presque une heure la moyenne augmente en sautant les monts les plus hauts du secteur. Je passe quelques enfilades à la limite de mes possibilités, ça glisse des deux roues, j’ai peur, mais c’est la fin de cette folle course pour passer sur une autre montagne, par une piste de 15 kilomètres sans bitume cette fois.

On fait une pause entre deux routes, un médaillon du cadastre italien m’amuse beaucoup et je trouve encore moyen détecter de la romance dans ce bout de métal. Je me pose dans une petite chapelle comme pour prier la bonne grâce du dieu des voyageurs et on remonte sur les motos direction la montagne toute sombre qui fait peur. Au programme, passage de gués, lits de feuilles et sauts de moutons entre les ornières boueuses. On donne le départ de ce coin perdu dans les hautes contrées, nous devons prendre une bifurcation qui va nous emmener sur 15 kilomètres dans un dédale de pistes forestières qui vont serpenter entre falaises, chemins et feuilles mortes. Là partie s’annonce corsée et je vais rapidement faire passer les trails devant. Avec nos routières il est certain que nous sommes à la peine mais nous prenons le temps et c’est la l’objectif. En trail on va vite, trop vite et on ne capte pas l’essentiel des paysages car il faut se concentrer sur la piste. Nous on grimpe comme des escargots mais on est en mesure de jauger l’importance des sites traversés. Autre plaisir. C’est un pied de nez à la course à l’armement permanent dans le domaine du trail. On se retrouve vite seul sur notre chemin ébouriffés de moultes variations, Valentin passe devant avec sa 1100 GSXF de 89 qui est plus à son aise en enduro que ma 900 diversion. Il a aussi 20 ans de moins, un petit gars courageux bientôt papa d’un deuxième enfant, c’est son dernier pepotour avant le renouveau.

Ça monte et à n’en plus finir. A la base le contournement de cette montagne fait 90 kms et on en fera 20 pour la passer en une heure. Nous pénétrons des territoires secrets, mais entretenus, toujours des poubelles et des dispositifs qui veulent inciter au respect du territoire, même là où nous sommes, mais pas de goudron comme pour dire, vous quittez le monde touristique pour venir chez nous, les locaux. C’est lundi donc personne n’est sur place et notre montagne se fait désirer. Les trails sont vite au bout du chemin et c’est bien normal, nous arrivons bien 10 minutes après pour retrouver un bitume timide et parsemé de forêt, c’est la descente du col. L’itinéraire reprend sur des strates de village accrochés au collines pour redescendre sur la vallée afin de séparer le premier groupe qui va travailler tôt le lendemain et partir par l’autoroute. Un petit resto dégoté dans une bourgade pas typique du tout mais encore une fois le sourire de l’hôte est une récompense salvatrice.

séparation des groupes…

Quelques foccacia plus tard et boissons il est temps de diviser l’équipe. Sur 7 on se retrouve à 3, moi, Patwick et Lionel les deux anciens. L’un a une Moto Morini 650 Xcape récente et l’autre une 850 Tdm 4tx qui nous avons refait lui et moi une semaine avant le départ. On a roulé une matinée pour faire 150 kms. Il en reste plus de 500 dont 350 de montagne et il va falloir enclencher la deux. Mon objectif, arriver avant la tombée du soleil dans la plaine de Pavie aux environs de Varzi. Cette portion de route je la connais par cœur, c’est un grand ruban qui s’étale vers le Nord, Ligure, Lombardie et piémont. On ne va quasiment croiser personne et de très rares motos sauf quelques allemands en GS flambantes et sur équipées.

J’enclenche la première et ça sera un défi supplémentaire à tenir, arriver avant la fin du jour pour prendre le grand ruban et rentrer. Mes deux compères sont fidèles, vaillants et courageux, je n’ai aucun doute sur eux malgré un bilan ophtalmologique défavorable pour ces solides compagnons. Ça part en enfilades sur de la rase campagne, on se place en formation serrée comme des avions de chasse et j’ai demandé à Patwick de me coller au train. Les pauses seront de 10 minutes par heures qu’il faut gagner sur le gps pour tenir la moyenne. Là campagne est déserte mais méfions nous du tracteur qui sortira des champs car l’herbe est haute. Une espèce de gros nuage va se former au dessus de nos têtes, comme si Gandalfe le gris avait prononcé une formule magique, on va se faire la course entre lui et nous mais on va bien voir qu’il nous pardonne nos erreurs de pilotage. Le parcours est exceptionnel, rapide est intuitif, on roule à 55 de moyenne, c’est rapide. Il s’intercale avec parfois un bout de piste en gravier, un bout de ruelle à passer sur des œufs, et des petits hameaux isolés. Entre toutes ces variations, c’est gaz en grand entre les virages.

On avance très bien et la progression est intéressante, mes deux artistes sont performants, endurant, mais je veille. Vite une arrivée à Bobio, station de montagne en travaux et on file comme des éperviers sur notre cible. L’après midi passe vite est nous sommes ennivrés de la cadence qui nous plonge dans le moment de grâce ou la douleur va disparaitre pour laisser place à la méditation. Oui la méditation. Le truc est tellement fort et intense que les chaînes sont libérées, tout est oublié, plus que la nature, l’aventure et la sportivité du truc.  C’est mon moment préféré, le paroxysme du challenge, l’apogée de la courbe des sensations. On traverse 1000 cols, monts et vallées, quand je jète un coup d’œil dans le rétro ils sont là et j’en suis rassuré. On arrive sur Bardi, une belle cité médiévale, puis on file sur un mix de vallons et villages qui peuvent ressembler à la Toscane. Je sais qu’on arrive au Passo Santa Barbara et au Passo Penicce, les deux spots qui vont sonner la descente sur la vallée et le retour.

Une petite pause sur un spot au détour d’un virage ou l’herbe haute me fait penser au film gladiateur, silence Total et apaisement avant de reprendre la trace .

La route devient acérée et un beau goudron nous tire avec passion  devant la déesse Santa Barbara, comme pour faire une incantation d’adieu mais de remerciement. Aucune chute, aucune panne. Cette déesse de la guerre est là pour commémorer les temps sombre de l’histoire, sur son promontoire elle distingue tout notre parcours. Des montagnes à perte de vue. Je remarque que Lionel, le motocycliste guitariste ébéniste est comme ivre de rotation à 90 et 180°, mais il est heureux. Ce col je le considère comme l’entrée et la sortie de notre territoire de jeu, maintenant la cadence va tomber progressivement et nous allons retrouver la réalité. Sur une dernière intersection je demande à Patwick : Maintenant c’est soit 80 kms de vallée ou un dernier col.
Il me montre le col avec un sourire confiant. Il sera avalé sous le soleil couchant qui nous accueille sur la contrée de Pavie, comme pour saluer l’effort. 350 kilomètres de montagne en 6h, ll est 20h, le jour tombe au moment de rentrer sur le grand ruban, challenge réussi et retour à la maison.

Petite pensée à mon jeune Valentin qui avec la GSXF, dite, la bagnole, est tombé en rade à une heure de chez lui à cause d’une durite de dépression rebelle. Elle l’aura tirée hors frontières en attendant le retour en France pour le lâcher, encore un signe mystique. Tout ce qui entre au Pepo tour reste au Pepo tour, dans la puissance des phares additionnels on passe les autostrada en travaux à tombeaux ouverts, pour passer le Fréjus, les insectes vont crépir  nos carénages et nous avec. Arrivée minuit, je coupe le contact et il me faut plus de 5 minutes pour décompresser avant de quitter la selle, comme une partie de chemsex de 3 jours, complètement vidé, complètement épuisé, mais la liberté c’est ainsi que je vais la chercher. Le son des grillons n’arrive même pas à mes tympans tant je suis sourd, pour faire le moindre geste il me faut une éternité. Je me couche bien plus tard pour faire tomber la pression, au réveil je serais comme une mouche écrasée sur un casque à 130, totalement éclaté et dans un autre monde.

Fin

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