Nous avons roulé à Rijeka

En 2012 pour la première fois de ma vie je posais mes roues sur un circuit, cinq ans plus tard, mes amis m'offraient la possibilité de ré-éditer l'expérience, au même endroit et dans les mêmes circonstances à savoir aller en Croatie à Rijeka participer avec eux à Grab the Flag.

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 En 2012, alors que démarraient les parutions du magazine RAD, les activités sur piste en motos anciennes de mes amis prenaient également de l’ampleur. J’avais décidé de les suivre et de relater régulièrement leurs péripéties, l’idée étant de montrer que la moto ancienne au sens large peut se pratiquer sur circuit, dans le cadre d’un championnat sous l’égide de la FFM sans pour autant bénéficier du budget de Tech3. Et puis rester sur le bord de la piste, regarder depuis le bord du paddock, ce n’est pas ce que je voulais au fond, l’essentiel étant de participer comme disait Pierre de Beaufixe, je décidai de me lancer aussi. Trouver une monture à ma portée serait le premier pas, l’ami Hugues me proposa sa Suzuki T350 à coque Roca, rapidement préparée en vue d’un bol d’argent qui n’eut jamais lieu, elle était restée à la poussière, en mars 2012 il me confie donc cette moto, très vite, en avril suivant elle serre violemment sur le circuit du Luc, lors de ma prise de contact à son guidon. Première d’une longue série de péripéties. Le moteur sera tout juste réparé par Fabrice Lab dans le courant du mois de septembre, juste à temps pour embarquer avec toute la fraîche troupe de RAD Racing en direction de la Croatie pour participer à Grab the Flag, un championnat organisé par Irma, une citoyenne allemande qui tient un atelier moto non loin de Munich. 20 septembre 2012 donc, ma première vraie prise de contact avec un circuit, sur cette moto mal fagotée, réparée à la hâte avec encore beaucoup de zones critiques (qui ne pardonneront pas à moyen terme d’ailleurs), engoncé comme un gigot dans une combarde trop petite pour moi (il fallait choisir entre le tshirt ou la dorsale pour pouvoir fermer le zip). Pourtant ce fut une très belle expérience, d’un point de vue « racing » cela n’apporta rien de bien probant (c’est toujours le cas aujourd’hui) mais d’un strict point de vue de ma satisfaction personnelle, ce fut parfait. Ajoutons à cela que Grab the Flag réunissait un plateau magnifique de motos plus étonnantes et superbes les unes que les autres, dans une ambiance ultra conviviale.
La Suzuki Roca ne cassera pas cette fois-ci, mais le 350 dont la pompe à huile avait été virée pour cause de « préparation » s’avèrera très fragile et l’embiellage cassera à trois reprises, de nombreux moteurs plus tard et après beaucoup d’enseignements acquis sur ces twins Suzuki, nous arrivons en 2017, année de mes 50 balais à l’occasion desquels mes potes me feront la surprise de m’inviter à revenir à Rijeka, là où tout avait pour ainsi-dire commencé. J’ai depuis opté pour le moteur 250, avec 54 d’alésage et 54 de course, il me semble bien plus stable que le 350 qui est en réalité, avec 61 d’alésage un 315cc. La moto a bien évolué depuis 2012, plus que moi en tout cas, j’avais tout de même réussi à serrer ce moteur 250 lors de la Classic Race à la Genetouze, mais cette fois ci, plus classiquement, en haut comme un vrai deux temps, et non plus au niveau de la tête de bielle sur le vilo comme les trois fois précédentes, mais toujours est il que c’est quasiment quatre jours avant de partir que je récupère mes cylindres réalésés à la dernière côte chez Euroculasse à St Etienne. Le vendredi matin je pars pour Lambesc rejoindre Yvan chez lui à l’atelier Flatmaxx, nous avons prévu de terminer le remontage du moteur et de vérifier les derniers points avant de partir. Cela nous prendra la journée et à un moment, je passe devant sa combarde de piste accrochée à un mur, d’un coup j’ai un flash ; « je ne me souviens pas avoir chargé la mienne dans le fourgon… » Je file vérifier, hélas mes doutes se confirment, j’ai oublié tout le matos ; combarde, bottes, dorsale, gants et casque ! Quel con, après avoir fait le tour des possibilités je me résigne à me taper un aller-retour chez moi, 400 bornes aller-retour de nuit, quand on a pas de tête, on bouffe un plein.
Le samedi sera occupé à finaliser les préparatifs, faire les courses pour 4 jours et 4 personnes, charger quatre motos sur une remorque en faisant en sorte de n’en perdre aucune lors des 1000km qui nous attendent et à remplir le coffre du fourgon avec nos affaires. A l’aube le dimanche nous partons pour une journée de route à travers l’Italie, de Vintimille à Venise, ligne droite Ouest-Est puis passage en Slovénie pour quelques kilomètres et enfin la Croatie en fin de journée sous un ciel bien menaçant. Grab the Flag c’est trois jours de piste, du lundi matin une fois les vérifications techniques passées au mercredi soir au terme de la course d’endurance. Nous partageons le box avec des Suisses de la région de Zurich, la conversation se fait en anglais, mais le courant passe bien, ils ont amené de très belles et très rapides machines dont une Triumph à cadre Seeley et à moteur Weslake twin 500, une tuerie dont la mission sera de ne pas laisser les deux Paton remporter la course. Ils nous inviteront même à leur soirée raclette pour fêter leur victoire, mission accomplie, la Triumph n’a rien laissé aux Paton, il faut dire que c’est Ives Glauzer qui la pilotait et c’est un tueur. (Photo ci-dessus Ives Glauzer juste après sa victoire avec la Triumph Seeley à moteur Weslake 500)
NOUS SOMMES À RIJEKA
Est ce que la Suzuki va fonctionner ? Personne ne le sait, si ça se trouve on a fait tout ça pour rester sur le bord de la piste. On finalise encore des réglages alors que chacun de mes trois autres compères a sa part de soucis à gérer ; Yvan a pris la BMW 500 à cadre spécial dont le moteur a été totalement refait. Christophe aligne une Ducati Pantah 350cc qui se révèle une excellente surprise au fil des épreuves sur lesquelles elle est engagée, fiable, relativement rapide, elle n’a pas couté très cher et elle rempli parfaitement sa mission. Patrick a pris la BSA à cadre Seeley et moteur Goldstar/Absaf qui a super bien tourné à Ledenon lors de l’avant-dernière épreuve du VMA. Tout le monde est aux petits soins pour les autres, c’est sur un événement comme ça, à quatre que l’on se rend compte qu’il est totalement fou de vouloir tenter l’aventure seul, le soutien des potes sera primordial et plusieurs fois je me ferai la réflexion ; « je n’aurais pas pu vivre ça sans leur aide » et pas seulement financière.
GRAB THE FLAG, C’EST QUOI ?
Il faut quand même que je vous parle de Grab the Flag, l’organisatrice, Irma est basée à Munich où elle gère un atelier consacré aux motos anciennes, chaque année elle organise plusieurs courses sur des circuits à l’Est, par le passé il y eu des épreuves à Pannonia en Hongrie ou Schleiz vers Weimar dans l’ex-Allemagne de l’Est, Rijeka en Croatie, il y eu même une date à Dijon et aussi au Slovakiaring, en Slovaquie, pays de l’ex-Yougoslavie, coincé comme vous le savez, entre Tchéquie et Hongrie. Avec un site internet très basique (www.grabtheflag.de) et très peu voire pas de communication elle parvient à réunir lors de ces rendez-vous sur piste plus de 150 pilotes venus principalement d’Allemagne mais également d’Autriche, de Suisse, de Hongrie parfois même de Grèce et quelques français. Sur les grilles de départ des différentes catégories ce sera l’occasion de voir autant en vintage des avant-guerre comme les BMW R57 de 1928 ou Norton Inter de 1932 que des flopées de SR500 parfois très tapées en Classic500, catégorie dans laquelle subsistent courageusement encore quelques Ducati et une Moto-Guzzi. Parmi les autres classes citons de très belles Manx, des Seeley G50, pas mal de Morini 350, quelques Motobi, des Aermacchi, beaucoup de Triumph et de Norton, quelques Yamaha TR1 bien sauvages etc etc… les 167 engagés lors de l’épreuve à laquelle nous avons participé ne peuvent pas être tous listés ici.
Christophe sur la petite Ducati Pantah 350cc n’a eu qu’à fignoler ses réglages et à tourner la poignée durant les 3 jours
 
 La Suzuki Roca n’était pas bien réglée, ne prenait pas tous ses tours et s’asseyait en 6e, mais elle a tenu le coup.
Connaissez-vous Awo ? Vous avez ici deux exemplaires de cette moto est-allemande 250cc des années 50
NSU Osl 250cc de 1929 coulissante et rapide !
Une AJS 500cc de 1953 qui s’en laissait pas compter sur la piste, le son valait l’image !
Une BSA Goldstar, une remorque atelier, tout Grab the Flag est résumé là…
Cette Suzuki T500 cachait de bien étranges secrets sous l’apparence classique de son moteur : des culasses rapportées vissées.
Magnifique Norton Commando Seeley de chez Steve Maney que du beau matos là dessus
Ce 1200cc Harley monté façon Lucifer’s Hammer était engagé dans la classe BoTT (Battle of the Twins)
Une MZ-HB pour Hartmut Bischoff légendaire pilote et concepteur est-allemand qui est à l’origine de cette 250cc
 QUEL BILAN ALORS ?
Si la Suzuki n’a été vraiment opérationnelle à 80% (ce qui était déjà pas mal vu d’où l’on partait) que le dernier jour pour la dernière course, je suis resté sur ma faim puisqu’au bout de 3 tours, un accident a fait sortir les drapeaux rouges, tout le monde sort et puisque l’endurance arrive peu après, ce sera terminé pour de bon. Reste à peaufiner certains trucs, changer les carbus pour des plus petits qui iront mieux à ce moteur là et surtout à essayer de rouler un peu plus vite et à freiner nettement plus tard… pas gagné quand on roule une fois ou deux par an. La BMW 500 d’Yvan s’est très bien comportée, le nouveau moteur donne satisfaction et a permis de belles passes d’arme avec la Drixton Honda 500 de notre voisin de stand Werner Joos, quasiment au coude à coude durant toute la première course, il partira loin devant dans la seconde manche et seul le décès de son moteur lui fera passer la main. Pour Christophe sur la Ducati, engagé dans la même catégorie Classic 350 que moi, il terminera la première course à la 5e place et sera 4e lorsque la deuxième sera stoppée. Ajoutons à cela qu’il remportera sa catégorie lors de l’endurance, associé à Patrick que cette victoire de classe consolera de la rupture du vilebrequin de sa BSA Seeley-Goldstar avant même de pouvoir l’aligner pour une des courses. Ajoutez à toutes ces émotions une ambiance unique un esprit d’entraide et de sympathie qu’on rencontre assez rarement ailleurs, un superbe pays avec des tarifs encore très tenus (on y mange très bien en plus) vous comprendrez donc que ce voyage à Rijeka reste un magnifique souvenir que je dois à mes amis qui m’ont supporté à tous les sens du terme pendant la petite semaine que tout cela a duré, je ne pourrai jamais assez les remercier.
Vous pouvez aller jeter un coup d’œil sur le site de Grab the Flag en cliquant ICI

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